ETAT PROCOAGULANT ET CIRRHOSE: RÔLE DU FACTEUR VON WILLEBRAND ET D’UN ÉTAT PROCOAGULANT

Bien que la cirrhose soit associée à une baisse des facteurs de coagulation, il est suggéré que les patients atteints de cirrhose soient à plus haut risque de développer des complications thromboitiques, notamment en raison d’un baisse des facteurs anticoagulants fabriqués par le foie. A titre d’exemple, une étude italienne (Villa et al. Gastroenterology 2012) a démontré que le traitement par HBPM des patients ayant une cirrhose avec un score de Child-Pugh B avaient une meilleure survie et moins de complications hépatiques que les patients traités par placebo. Ce bénéfice des HBPM serait en partie lié à la prévention des phénomènes thrombotiques hépatiques, qu’ils touchent la microcirculation ou le tronc porte et ses branches, ainsi qu’en retardant le phénomène d'”extinction parenchymateuse” proposé par Wanless.

Dans ce travail grec, les auteurs ont analysé le rôle des facteurs impliqués dans l’hémostase sur la survenue d’événements hépatiques chez 102 patients cirrhotiques présentant une thrombopénie. Plus la cirrhose était avancée, plus les patients présentaient un déséquilibre de la coagulation orientant vers un phénotype thrombotique. En particulier, le facteur von Willebrand et le rapport du facteur VIII sur la protéine C prédisaient la mortalité, le risque d’hémorragie variqueuse et la survenue d’une ascite. Cette étude suggère donc que le traitement anticoagulant des patients ayant une cirrhose sévère pourrait permettre de diminuer les complications hépatiques et la mortalité.

CARVÉDILOL: UN PLACE DANS LA PRISE EN CHARGE DES PETITES VARICES OESOPHAGIENNES?

Alors que la place des bétabloquants est bien établie dans la prévention primaire de l’hémorragie variqueuse, cette classe médicamenteuse n’a pas fait la preuve de son efficacité chez les patients présentant de petites varices oesophagiennes, dans le but de prévenir leur augmentation de taille. Une seule étude italienne, publiée en 2004, avait suggéré l’intérêt du nadolol dans cette indication.

Dans ce travail indien en double aveugle, les auteurs ont randomisé 140 patients présentant de petites varices oesophagiennes en deux bras: placebo et carvédilol (3,125 mg x2/j, en augmentant progressivement jusqu’à 12,5 mg x2/j en l’absence d’hypotension et de bradycardie <55/min). Le traitement était poursuivi pendant 2 ans et les patients étaient suivis régulièrement, cliniquement et par une endoscopie haute pour déterminer la croissance ou non des varices. La plupart des patients avaient une cirrhose d'origine dysmétabolique. La prise de carvédilol était associée à une probabilité plus élevée de garder des varices de petite taille: 79,4 contre 61,4%, et ce pour une durée plus longue. Il n'était pas noté de différence sur le gradient de pression porto-systémique. la tolérance clinique du traitement était bonne. A confirmer et à suivre!

TRANSPLANTATION POUR HÉPATITE ALCOOLIQUE RÉSISTANT AU TRAITEMENT MÉDICAL: L’EXPÉRIENCE DE BALTIMORE

La transplantation hépatique pour hépatite alcoolique résistant au traitement médical fait l’objet de nombreuses controverses, en raison d’un manque de données suffisantes mais aussi de débats éthiques et sociétaux qui varient grandement d’un pays à l’autre. Le travail pilote multicentrique franco-belge publié en 2011 (Mathurin et al. N Engl J Med) a suggéré que la transplantation en procédure accélérée (c’est-à-dire sans attendre de période de sevrage “suffisante”) permettait d’améliorer de manière très importante la survie de patients présentant un premier épisode d’hépatite alcoolique sévère avec un échec du traitement médical. En l’absence de transplantation, le pronostic de ces patients est sombre à court terme avec une mortalité de plus de 70% à 6 mois.

Dans ce travail monocentrique de l’équipe de transplantation hépatique de Baltimore (Maryland, Etats-Unis), 17 patients ont été transplantés pour hépatite alcoolique et comparés à 26 patients transplantés pour cirrhose alcoolique décompensée abstinents depuis au moins 6 mois. La survie était excellente dans les deux groupes et il n’était pas noté de rechutes d’alcool plus fréquentes chez les patients transplantés pour hépatite alcoolique. Il faut souligner que la rechute d’alcool était assez fréquente dans les deux groupes, de l’ordre de 25%, au cours du suivi qui était en moyenne de 18 mois. Les patients transplantés pour hépatite alcoolique avaient plus souvent une consommation “à risque”, définie par une consommation régulière ou sous forme de “binge drinking” mais la différence n’était pas significative (peu de cas).

Au total, cette étude confirme les bons résultats de la transplantation hépatique pour hépatite alcoolique sévère résistant au traitement médical. Un travail français multicentrique est en cours pour confimer les chiffres observés par l’étude pilote publiée en 2011.

UN ARGUMENT FORT EN FAVEUR DU DÉPISTAGE DES MALADIES CHRONIQUES DU FOIE

Cette étude a évalué l’impact de l’accès aux spécialistes d’hépato-gastroentérologie sur la survie des patients avec une maladie chronique du foie dans une cohorte de 10 170 vétérans américains.

Les patients avec une maladie chronique du foie qui avaient consulté au moins une fois un spécialiste HGE avaient une survie significativement supérieure à celle des patients n’ayant jamais consulté. Il y avait même un “effet-dose”: ceux qui avaient consulté au moins trois fois avaient une meilleure survie que ceux qui n ‘avaient consulté qu’une seule ou deux fois.

TERLIPRESSINE DANS LE SYNDROME HÉPATO-RÉNAL : EN BOLUS OU EN CONTINU ?

Cette étude randomisée a évalué deux modalités d’admisnistration de la terlipressine au cours du syndrome hépato-rénal : en bolus toutes les 4 heures ou en perfursion continue.

Les deux modes d’administration étaient aussi efficaces en terme de taux de réponse complète (créatinine ≤133 µmol/L) ou partielle (diminution de la créatinine >50% mais qui reste >133 µmol/L): 65% dans le groupe Bolus vs 76% dans le groupe Perfusion Continue (p=NS). Par contre, il y avait significativement plus d’effets secondaires dans le groupe Bolus: 62% vs 35% dans le groupe Perfusion Continue (p<0.025).

VALIDATION DE L’ÉLASTOGRAPHIE IMPULSIONNELLE ULTRASONORE DANS L’HÉPATITE AUTOIMMUNE

Cette étude Allemande visait à évaluer la performance diagnostique de l’élastographie impulsionnelle ultrasonore (Fibroscan) chez les malades atteints d’hépatite auto-immune et de déterminer l’impact de l’activité de la maladie sur la précision diagnostique.

Une cohorte test de 34 malades et une cohorte de validation de 60 malades ont été inclus.

L’élasticité hépatique corrélait fortement avec la fibrose histologique. L’AUROC pour le diagnostic de cirrhose était de 0.95 avec un seuil à 16 kPa. Les performances du Fibroscan étaient altérées lorsque le Fibroscan était effectué dans les 3 mois suivant le début du traitement. Durant cette période, l’histologie corrélait avec le grade d’acivité mais pas avec le stade de fibrose.

L’inflammation a donc un impact majeur sur l’élasticité hépatique dans les premiers mois du traitement des hépatites auto-immunes.

IMPACT DE LA RÉPONSE VIRALE SOUTENUE SUR L’HYPERTENSION PORTALE CHEZ LES PATIENTS AVEC CIRRHOSE VIRALE C

Ce manuscrit publié dans Journal Of Hepatology a étudié l’effet sur l’hypertension portale de la réponse virale soutenue obtenue grâce à des nouveaux antiviraux sans interferon chez des patients avec cirrhose virale C. 104 patients ont été inclus et le gradient de pression a été mesuré par voie transjugulaire avant traitement antiviral puis après un traitement antiviral. La réponse virale soutenue était associée à une baisse significative du gradient de pression. Chez les patients avec un gradient de plus de 10 mmHg de mercure à l’inclusion, 63% avait une diminution de plus de 10% du gradient et 24% une diminution du gradient en dessous de 10 mmHg. Les patients Child Pugh B diminuaient moins fréquemment leur gradient de pression. Après réponse virale soutenue, une valeur de moins de 25.3 kPA au fibroscan permettait d’identifier les patients n’ayant pas d’hypertension portale cliniquement significative. Au total, la pression portale diminue après réponse virale soutenue obtenue grâce aux antiviraux de dernières générations chez les patients avec cirrhose virale C.

CRITÈRES DE TORONTO ET TRANSPLANTATION POUR CARCINOME HÉPATOCELLULAIRE: RÔLE DE LA DIFFÉRENCIATION TUMORALE

De nombreux critères de transplantabilité ont été établis ces dernières années pour le carcinome hépatocellulaire (critères de Milan, critères UCSF ou up-to-seven…). Plus récemment, le score AFP (Duvoux et al. Gastroenterology 2012 attribue des points à trois caractéristiques tumorales: taille du plus gros nodule, nombre de lésions et taux plasmatique d’AFP. Les critères de transplantabilité sont régulièrement remis en cause car il existe fréquemment une discordance entre le bilan avant transplantation – qui repose sur l’imagerie en coupes – et les données de l’explant. Actuellement, la plupart des critères ne prennent pas en compte la différenciation de la tumeur qui est un facteur très important de récidive sur le greffon.

Dans ce travail canadien, les auteurs ont cherché à valider leurs critères, dits de Toronto (Du Bay Ann Surg 2011), dans plusieurs cohortes de patients atteints de carcinome hépatocellulaire et transplantés. Les critères prennent en compte l’absence de faible différenciation tumorale, l’absence de signes généraux de cancer, l’absence d’atteinte extrahépatique et d’envahissement vasculaire, quels que soient le nombre et la taille des lésions. Ces critères étaient appliqués à une population de patients présentant les critères de Toronto (n=243), que les patients soient dans les critères de Milan (n=138) ou hors critères de Milan (n=105).

Sur l’ensemble de la cohorte des patients remplissant les critères de Toronto (n=243), la survie n’était pas différente que les patients soient ou non dans les critères de Milan (survie à 5 ans de l’ordre de 70 à 80%) et la courbe ROC des critères de Milan était mauvaise (aire sous la courbe inférieure à 0,6). Le taux d’AFP permettait de scinder les patients à risque de récidive postopératoire de manière satisfaisante.

La conclusion des auteurs est que les critères de Toronto permettent d’amener les patients à la transplantation, quels que soient le nombre et le taille des lésions de CHC. Un taux d’AFP supérieur à 500 ng/ml prédit de façon satisfaisante l’évolution après transplantation. Ce nouveau score qui prend en compte la différenciation tumorale et qui nécessite donc une biopsie avant transplantation doit bien entendu être confirmé dans d’autres mains…

ETUDE RANDOMISÉE COMPARANT LES LIGATURES HEBDOMADAIRES VS. TOUTES LES 2 SEMAINES EN PROPHYLAXIE SECONDAIRE DE LA RUPTURE DE VARICES ŒSOPHAGIENNES

La prophylaxie secondaire de la rupture de varices œsophagiennes comprend des ligatures de varices itératives. Cependant, l’intervalle optimal entre les séances de ligatures n’est pas connu.

Cette étude prospective Américaine menée de 2008 à 2014 a randomisé 90 malades ayant fait une rupture de varices œsophagiennes en 2 groupes : ligature de varices hebdomadaire jusqu’à éradication (n=45) vs. ligature de varices toutes les 2 semaines jusqu’à éradication (n=45). Des bêtabloquants ont été adjoints dans les 2 groupes.

Les ligatures hebdomadaires permettaient d’obtenir plus rapidement une éradication des varices (82% d’éradication à 1 mois vs. 51% dans le groupe de ligature toutes les 2 semaines). Il n’y avait en revanche pas de différence entre les 2 groupes pour ce qui concerne le nombre d’endoscopies nécessaires (2.3 vs. 2.1), le taux de ressaignement à 1 mois ou à 2 mois, le taux de dysphagie/odynophagie/douleur thoracique (9% vs. 2%), le taux de sténose œsophagienne (0% vs. 0%), et la mortalité (7% vs.7%).