Publication des articles de veille scientifique

INFLAMMATION SYSTÉMIQUE DANS LA CIRRHOSE DÉCOMPENSÉE: ÉTUDE DU CONSORTIUM CLIF

De nombreux travaux ont souligné le rôle de l’inflammation systémique dans la cirrhose décompensée, notamment dans le cadre de l’ “ACLF” (acute on chronic liver failure). Même si cette entité est très hétérogène en termes de causes de dysfonction hépatique (réactivation virale B, hépatite alcoolique, infection…), il semble que le déterminant commun, indépendamment de la cause, soit l’inflammation systémique. Dans ce travail multicentrique, les auteurs se sont intéressés au profil inflammatoire systémique chez les patients présentant une “ACLF”. les paramètres inflammatoires étudiés étaient notamment la copeptine, l’activité rénine plasmatique et le statut rédox de l’albumine.

En cas d'”ACLF”, les marqueurs d’inflammation systémique et de dysfonction circulatoire étaient plus élevés que chez les patients ayant une décompensation hépatique aiguë sans “ACLF”, et nettement plus élevés que les sujets sains pris comme contrôles. Une corrélation forte était observée avec la sévérité de l’ACLF, le pronostic et la cause.

Ce nouveau travail confirme donc le rôle de l’inflammation systémique dans la dysfonction circulatoire de la cirrhose décompensée et émet l’hypothèse que cette inflammation soit l’élément déclenchant des complications systémiques de la cirrhose après un élément initial précipitant.

COMPARAISON DE LA RADIOFRÉQUENCE MONOPOLAIRE À LA RADIOFRÉQUENCE MULTIBIPOLAIRE « NO TOUCH » DANS LE TRAITEMENT CURATIF DU CHC

La radiofréquence (RF) monopolaire constitue en l’insertion intratumorale d’une sonde de radiofréquence afin d’obtenir par thermothérapie un traitement curatif du carcinome hépatocellulaire (CHC). La RF multibipolaire « no touch » consiste en l’insertion de plusieurs sondes de radiofréquence en péritumorale afin d’obtenir une marge de sécurité plus importante. Une étude multicentrique rétrospective française a comparée la RF monopolaire à la RF multibipolaire No touch dans le traitement des CHC dans les critères de milan. Après utilisation d’un score de propension, 181 patients avec CHC traités par RF monopolaire ont été comparés à 181 patients avec CHC traités par RF multibipolaire No Touch. Le pourcentage d’échec du traitement percutané (combinant l’échec primaire à la récidive locale) était plus bas dans le groupe RF multibipolaire No touch à 5 ans (9.2%) comparé au groupe RF monopolaire (36.7%, P<0.001). La survie globale était identique entre les deux groupes. En conclusion, une nouvelle technique de radiofréquence « multibipolaire No Touch » est associée à une meilleure efficacité en terme de contrôle locale de la maladie.

PRÉVALENCE DE LA CHOLANGITE SCLÉROSANTE PRIMITIVE CHEZ LES PATIENTS AYANT UNE MICI

Dans un article publié dans Gastroenterology, une équipe norvégienne a étudiée la prévalence de la cholangite sclérosante primitive (CSP) sur l’IRM chez des patients atteints de MICI. Sur 322 patients avec une MICI, 24 patients (7.2%) avaient une CSP avec une atteinte intrahépatique des grosses voies biliaires de manière isolée le plus souvent. Sur ces 24 patients seulement 7 patients avaient une CSP déjà connue. Les facteurs de risque d’avoir une CSP étaient les suivants : une colite étendue, un ATCD de colectomie et des symptômes persistants d’une MICI. 65% des patients avec une CSP à l’IRM n’avaient ni symptômes, ni anomalies du bilan hépatique. L’évolution à long terme de la pathologie hépatique diagnostiquée de manière fortuite reste indéterminée.

En conclusion, il semble exister des CSP infracliniques chez les patients ayant une MICI. L’intérêt du diagnostic de la CSP chez ces patients reste à déterminer.

SCORE PRÉDICTIF DE SURVENUE DU CARCINOME HÉPATOCELLULAIRE SUR CIRRHOSE VIRALE C

Une étude multicentrique française a suivi de manière prospective 1323 patients atteints de cirrhose virale C afin d’identifier les facteurs de risque de survenue du carcinome hépatocellulaire (CHC). Cette étude publiée dans Hepatology a permit de créer un score prédictif de survenue du CHC combinant 5 variables associées de manière indépendante à la survenue du CHC : un âge supérieur à 50 ans, un ATCD de consommation excessive d’alcool, un taux de plaquettes < 100 000/mm3, des GGT supérieures à la normale et l’absence de réponse virale soutenue. Ce score prédictif de survenue de CHC est utilisable de manière individuelle pour évaluer le risque de CHC chez chaque patient. En conclusion, la combinaison de variables cliniques et biologiques permet de prédire de manière individuelle le risque de survenue de CHC chez les patients avec cirrhose virale C.

LES TAUX PLASMATIQUES DE COPEPTINE SONT UN BIOMARQUEUR DE PROGRESSION DE LA CIRRHOSE ET DE PRONOSTIC

La recherche sur la vasopressine (AVP) dans la cirrhose et sur son rôle pronostique a été gênée par les difficultés de mesurer ses taux plasmatiques de manière fiable. La copeptine est un glycopeptique libéré par l’hypophyse en même temps que l’AVP. Le but de cette étude Barcelonaise était d’investiguer la valeur pronostique de la copeptine.

321 malades ont été inclus à Barcelone. Les taux de copeptine étaient plus élevés chez les malades avec cirrhose décompensée que chez ceux avec cirrhose compensée. Les taux de copeptine corrélaient avec le MELD et les paramètres de fonction rénale. Les taux de copeptine étaient un facteur prédictif indépendant de complication de la cirrhose et de mortalité à 3 mois. Ces données ont été confirmées dans une cohorte de validation Européenne.

La copeptine apparaît donc comme un nouveau biomarqueur de progression de la cirrhose.

VALIDATION DES CRITÈRES DE BAVENO VI D’IDENTIFICATION DES MALADES ATTEINTS DE CIRRHOSE À FAIBLE RISQUE D’AVOIR BESOIN D’UN DÉPISTAGE ENDOSCOPIQUE DES VARICES

La conférence de Bavéno VI sur l’hypertension portale a proposé de ne pas faire de dépistage endoscopique des varices œsophagiennes chez les malades ayant une élasticité hépatique < 20 kPa et un taux de plaquettes > 150’000 /µL, puisque cette association peut exclure une HTP cliniquement significative. Le but de cette étude Londonienne était de valider ces critères.

Les données des Fibroscans effectués de 2006 à 2015 dans 2 centres ont été collectées. Les critères d’inclusion étaient une élasticité hépatique > 10 kPa et une endoscopie dans les 12 mois autour du Fibroscan.

310 malades (55% d’hépatites C ; 89% de Child Pugh A) ont été inclus. Des varices étaient observées chez 23% des malades et des varices à haut risque chez 5%. 102/310 (33%) malades avaient les critères de Bavéno VI mentionnés ci-dessus (élasticité hépatique < 20 kPa et taux de plaquettes > 150’000 /µL). Au sein de ce groupe, 11% avaient des varices et 2% des varices à haut risque. Ainsi, les critères de Bavéno VI avaient une sensibilité de 87% et une spécificité de 0.34% et une valeur prédictive négative de 98%.

En conclusion, lorsque les critères de Baveno VI sont remplis, on peut ne pas faire d’endoscopie de dépistage des varices oesophagiennes. La sensibilité de ces critères est cependant faible.

ACIDES BILIAIRES ET STÉATOPATHIE MÉTABOLIQUE: UNE REVUE

L’essai FLINT a démontré que l’acide obéticholique était une piste particulièrement intéressante dans le traitement de la stéatohépatite non alcoolique. Les acides biliaires ont un rôle à différentes étapes de la progression de la stéatopathie métabolique (sensibilité à l’insuline, métabolisme des glucides, stockage des graisses…). Cette revue coordonnée par un grand nom de la pathologie biliaire (Michaël Trauner) fait le point sur les interactions entre acides biliaires et stéatopathie métabolique, fait le point sur les stratégies de traitement en cours et dégage les futures pistes thérapeutiques.

L’ARN DU VHC PEUT PERSISTER DANS LE FOIE APRÈS TRAITEMENT ANTIVIRAL DIRECT: UNE ÉTUDE SUR LES EXPLANTS HÉPATIQUES

Des données montrent que la persistance de l’ARN du VHC à taux faibles à l’arrêt du traitement antiviral peut néanmoins être associée à une réponse virologique prolongée. Dans ce travail mené chez 39 patients en attente de transplantation traités par antiviraux directs puis transplantés, les auteurs ont évalué la présence de l’ARN du VHC sur l’explant et déterminé l’évolution virologique après transplantation. Au moment de la transplantation, tous les patients avaient atteint une réponse prolongée à 12 semaines et le traitement était donc interrompu depuis plusieurs mois. Sur l’ensemble de la population, la durée médiane du traitement était de 17 semaines.

Les deux tiers des patients avaient de l’ARN du VHC détectable sur l’explant. Chez les patients qui avaient de l’ARN détectable, le traitement antiviral avait été plus court que chez les autres. Malgré un ARN détectable dans les deux tiers des cas, 85% des patients ont été considérés comme guéris après la transplantation. Ces données surprenantes confirment donc que l’éradication virale C peut être obtenue malgré la persistance de virus dans le foie à l’arrêt du traitement antiviral. Il est possible que cet ARN ne soit pas fonctionnel ou qu’un défaut de réponse immunitaire médiée par l’interféron soit présent, empêchant l’élimination virale complète, tout du moins pendant un temps.

POIDS DES HÉPATITES VIRALES DANS LA SANTÉ DES POPULATIONS DE 1990 À 2013: UNE ÉTUDE MONDIALE

Etant donné les effets des nouveaux traitements du VHB et du VHC ainsi que les efforts effectués en termes de prévention et de vaccination, l’épidémiologie des hépatites virales s’est modifiée. Cette très large étude a modélisé l’influence des hépatites virales A, B, C, E dans le monde en comparaison à la période 1990. Sur la période étudiée, le poids des hépatites virales dans la morbi-mortalité s’est accentué. A titre d’exemple, les hépatites virales sont passées de la 10e à la 7e cause de décès dans le monde entre 1990 et 2013. De manière générale, la mortalité liée au VHA, au VHB et au VHE a diminué sur la période d’étude alors que celle liée au VHC a augmenté. Des données futures seront nécessaires pour affiner le rôle des nouveaux traitements antiviraux directs anti-VHC sur la réduction de mortalité à l’échelle mondiale.