Informations pratiques
LES MALADIES DU FOIE
L'HÉPATITE D

L’hépatite D est une maladie du foie qui survient après une double infection par le virus de l’hépatite B (VHB) et le virus de l’hépatite D (VHD). L’infection VHD ne survient qu’en cas d’infection par le VHB qui lui permet d’entrer et de sortir de l’hépatocyte (1). On parle de coinfection si l’infection par les 2 virus est simultanée (situation rare); on parle de surinfection si le patient est déjà porteur chronique du VHB et s’infecte secondairement par le VHD (situation beaucoup plus fréquente).

La maladie en chiffres

La prévalence de l‘infection Delta se superpose à celle du VHB, malgré de grandes disparités géographiques entre les deux virus. Globalement, l’infection VHD touche 5% des 240 millions de personnes infectées chroniquement par le VHB soit environ 12 millions d’individus coinfectés VHB-VHD.

Les zones de forte prévalence (40% des porteurs chroniques du VHB) comprennent certains pays d’Afrique (République de Centre Afrique, Mauritanie…), le Nord de l’Amérique du Sud (région Amazonienne) et l’Asie centrale (Mongolie et Pakistan).

Les zones de prévalence intermédiaire (10% des porteurs chroniques du VHB) sont situées également en Afrique, en Asie, en Océanie et sur le pourtour méditerranéen ainsi qu’en Europe de l’Est et dans le Sud-Est de la Turquie. L’Europe du Nord et de l’Ouest, l’Amérique du Nord constituent des zones de faible prévalence où le virus circule essentiellement au sein de populations à risque (usagers de drogues par voie intraveineuse, partenaires sexuels multiples, patients vivants avec le HIV…).

De façon surprenante, l’infection par le VHD est peu répandue en Inde et dans le Sud-Est asiatique malgré la forte prévalence du VHB.

Pourquoi et comment se développe-t-elle ?

Le virus Delta se transmet de la même façon que le virus B par voie parentérale (injection, lorsque la seringue est contaminée par exemple) ou par voie sexuelle.

Depuis 1990, grâce à la vaccination contre l’hépatite B et au dépistage systématique lors de dons du sang dans les pays développés, l’infection par le VHD est devenue moins fréquente. L’infection Delta persiste en Europe essentiellement en raison de l’immigration de patients coinfectés provenant de zones de forte endémicité. En France, 86% des patients coinfectés B-D sont des migrants originaires majoritairement d’Afrique subsaharienne (53%) et d’Europe de l’Est (19%). Les patients coinfectés nés en France (14%) sont le plus souvent des usagers de drogue par voie intraveineuse.

L’évolution est différente avec en cas de coinfection, une hépatite aigüe modérée, évoluant le plus souvent vers la guérison. En cas de surinfection, l’hépatite aigüe est plus marquée, évoluant dans plus de 70% des cas vers une hépatite chronique. Les hépatites chroniques B-Delta sont plus sévères que les hépatites chroniques B avec une évolution plus rapide vers la cirrhose et un risque accru de décompensation hépatique et de carcinome hépatocellulaire (CHC).

Quels sont ses symptômes principaux ?

Comme l’hépatite B, l’hépatite B-Delta est le plus souvent asymptomatique.

La coinfection B-D est plus sévère que la monoinfection par le VHB. Il existe un risque accru d’hépatites sévères et fulminantes avec apparition d’un ictère, d’une insuffisance hépatique pouvant justifier une transplantation en urgence.

L’évolution des hépatites chroniques B-Delta est également plus sévère que celle des hépatites chroniques B avec une évolution plus rapide vers la cirrhose qui se complique plus souvent avec apparition d’ascite et risque accru de cancer du foie (CHC).

Comment peut-on me la diagnostiquer ?

Le diagnostic d’infection Delta repose sur la recherche d’anticorps totaux anti-delta (sérologie) qui doit être systématique chez tout patient infecté par le VHB.

Il faut ensuite détecter et surtout quantifier la charge virale HDV par des techniques à présent mieux standardisées pour apprécier l’importance de la présence du virus.

En cas de coinfection B-Delta, la production virale B est ralentie voire inhibée par la réplication du virus D.

Comment puis-je me soigner ?

Malgré les progrès récents remarquables dans les traitements des hépatites virales, le traitement des hépatites Delta reste décevant. Les antiviraux qui contrôlent la réplication du VHB sont inefficaces contre le VHD. L’interféron alpha pégylé (Peg-IFNa) est actuellement le seul traitement commercialisé ayant une activité antivirale contre le VHD. Les recommandations actuelles pour l’hépatite chronique D sont de traiter au moins 48 semaines, mais la durée optimale de traitement n’est pas définie. En pratique, il faut poursuivre le traitement tant que la virémie Delta et la quantité d’AgHBs diminue ce qui peut parfois prendre plusieurs années.

Dans les études contrôlées où la durée de traitement a été d’au moins 48 semaines, les taux de réponse virologique soutenue 6 mois après l’arrêt du traitement sont décevants et varient de 25 à 30%.

Malheureusement, l’interféron alpha a de nombreux effets secondaires et peut être mal toléré. Son utilisation est difficile surtout lorsqu’il existe une cirrhose, ce qui est fréquent en cas de coinfection B-Delta. La seule possibilité thérapeutique repose alors sur la transplantation hépatique.

D’autres molécules qui agissent, soit en bloquant le récepteur d’entrée du virus, soit en inhibant son assemblage, sont en cours d’évaluation dans des essais cliniques.

(1) Hépatocyte : cellule épithéliale hépatique volumineuse, accolée à ses voisines en une file régulière, constituant la travée hépatique bordée par les sinusoïdes hépatiques. La membrane cytoplasmique de deux hépatocytes voisins forme la paroi d’un minuscule canal pour l’excrétion de la bile. L’hépatocyte a un rôle dans la synthèse du glycogène, des protéines et de lipoprotéines plasmatiques, de bile et dans la détoxification des déchets métaboliques.