Informations pratiques
LES MALADIES DU FOIE
JAUNISSE

La jaunisse (racine latine) ou ictère (racine grecque) est la coloration jaune de la peau et du blanc des yeux. Elle est due à l’augmentation de la concentration de la bilirubine (1) (pigment jaune produit par la destruction des globules rouges) dans le sang (au-delà de 40 µmoles/litre) et les tissus. Elle a de très nombreuses causes, des plus bénignes aux plus graves.

La bilirubine : en savoir plus

La bilirubine est un pigment jaune qui est le déchet de l’hémoglobine (la protéine qui transporte l’oxygène). « Libre » ou isolée, elle est soluble dans la graisse, mais pas dans l’eau. Très toxique pour le cerveau, elle doit donc être transportée dans le sang fixée à des protéines d’albumine. Pour pouvoir sortir de l’organisme, elle est captée par les hépatocytes (cellules du foie) qui la conjuguent à un dérivé du glucose (« bilirubine conjuguée », soluble dans l’eau) qui peut ensuite être transportée dans la bile vers le début de l’intestin grêle (duodenum), en passant par le canal hépatique puis le canal cholédoque.

La vésicule biliaire, branchée en dérivation, n’est qu’un lieu de stockage de la bile entre les repas. Au moment du repas, la vésicule se contracte, le petit muscle de la paroi du duodenum qui ferme la voie biliaire entre les repas (le sphincter d’Oddi) s’ouvre, et la bile peut aller se mélanger avec les aliments et le suc pancréatique (qui sort par le même orifice, la papille duodénale).

La bilirubine est transformée par les bactéries intestinales en stercobiline (pigment brun), qui colore les selles en marron. En cas de défaut d’excrétion de la bilirubine conjuguée, celle-ci reflue dans le sang puis passe dans les urines qu’elle colore en marron foncé. Les selles deviennent alors décolorées.

Pourquoi et comment se développe-t-elle ?

On distingue 2 types de jaunisse :

Jaunisse à bilirubine non conjuguée (les selles ne sont pas décolorées) qui peut-elle même être due à 2 mécanismes :

  • un excès de production de bilirubine: c’est ce qui se passe lorsqu’il y a une destruction excessive des globules rouges, appelée (hyper)hémolyse qui provoque aussi une anémie (« anémie hémolytique ») ; la concentration d’hémoglobine dans le sang est réduite, le taux de globules rouges jeunes (« réticulocytes ») est généralement augmenté, l’haptoglobine (une protéine qui se combine avec l’hémoglobine) est abaissée.

Les causes d’hémolyse sont très nombreuses, dues à des anomalies de la membrane des globules rouges souvent congénitales (« corpusculaires ») ou à une destruction de globules rouges normaux (extracorpusculaires).

  • un défaut de conjugaison de la bilirubine dans le foie due à défaut d’expression génétique de l’enzyme (2) qui conjugue la bilirubine (la glycuronosylyltransférase) : ce manque est très fréquent (environ 5% de la population occidentale), responsable d’une jaunisse modérée isolée transitoire et récidivante apparaissant en cas de jeûne, de fièvre  (et donc souvent d’infection), de déshydratation. L’examen clinique est normal. La prise de sang montre une augmentation prédominante de la bilirubine non conjuguée, l’absence d’hémolyse et d’autres signes de maladie du foie. Ce syndrome (souvent abusivement appelé maladie, alors qu’il ne compromet pas la santé) est nommé « syndrome de Gilbert » du nom du médecin français qui l’a décrit en 1901.

Une maladie génétique très rare et grave, la maladie de Crigler-Najjar, est quant à elle due à un déficit total ou quasi-total de l’enzyme.

Chez le nouveau-né, l’ictère « physiologique », maximal au 4ème jour de vie, favorisé par la prématurité, est lié au manque partiel et transitoire de la même enzyme. L’élévation de la bilirubinémie non conjuguée n’est que rarement importante, surtout en cas d’hémolyse associée (due par exemple à une incompatibilité Rhésus fœto-maternelle). Lorsque l’augmentation de la bilirubine est très importante, la bilirubine libre qui passe dans le cerveau peut causer des dégâts irréversibles (« ictère nucléaire »). La bilirubinémie doit donc être étroitement surveillée pour déterminer le traitement approprié (simple surveillance, exposition à la lumière bleue [« photothérapie »] qui détruit la bilirubine présente dans la peau, voire échanges plasmatiques ou exsanguinotransfusion).

Jaunisse à bilirubine conjuguée, presque toujours due à une cholestase (3). Les urines sont foncées, les selles décolorées, et il peut y avoir des démangeaisons (« prurit »).

L’augmentation de la bilirubine conjuguée peut être liée à 2 mécanismes :

  • obstacle sur les voies biliaires intra ou extra hépatiques (ictères obstructifs). On parle alors d’ictères cholestatiques pour les jaunisses dues à une cholestase.
  • maladies des cellules du foie (hépatocytes) diminuant l’excrétion dans la bile de la bilirubine conjuguée (ictères hépatiques).

Chez le nourrisson, la persistance d’un ictère au-delà d’une semaine, conjuguée à une décoloration des selles, fait douter du diagnostic d’ictère physiologique et découvrir que la jaunisse est à bilirubine conjuguée.

Les causes sont différentes de celles de l’adulte : l’atrésie (obstruction) congénitale des voies biliaires, des infections sévères, des maladies métaboliques et génétiques multiples.

Quels sont ses symptômes principaux ?

L’hypertension portale observée au cours de la cirrhose est responsable de deux complications principales :

  • le développement de veines (appelées aussi shunts (1), dérivations ou collatérales) qui court-circuitent le foie et sont à l’origine de la formation de varices dans l’œsophage ou l’estomac et entrainent des saignements digestifs potentiellement graves. Ces veines détournent également du foie le sang qui passe directement dans la circulation générale et ne subit donc pas l’effet « filtre et détoxifiant » du foie.
  • la production d’eau par le foie appelée ascite (2) qui va se répandre dans le ventre.
Comment peut-on me la diagnostiquer ?

Le diagnostic peut être fait au moment du diagnostic de la cirrhose grâce au dépistage : recherche de varices œsophagiennes (3) par endoscopie ou d’ascite par l’examen clinique ou radiologique. La présence d’une HTP est probable quand le taux de plaquettes est abaissé.

Il peut être fait tardivement au stade de complications : hémorragie par rupture de varices œsophagiennes et ascite principalement.

Comment puis-je me soigner ?
Différents traitements sont possibles en fonctions des complications observées : les traitements médicamenteux pour prévenir l’hémorragie par rupture de varices reposent sur la prise quotidienne de beta-bloquants. Le régime pauvre en sel et la prise de diurétiques sont la base du traitement pour lutter contre l’accumulation d’ascite.

D’autres interventions sont disponibles :

  1. TIPS : transjugular intrahepatic porto-systemic shunt

Le TIPS est une anastomose, c’est à dire une dérivation ou une sorte de court-circuit, qui met en communication une branche de la veine porte (qui arrive au foie) et une des veines hépatiques (qui sortent du foie).

Cela permet de court-circuiter un obstacle afin de rétablir une pression normale ou quasi normale dans le système de la veine porte.

Cette intervention est utilisée pour traiter ou prévenir les complications liées à l’HTP, principalement au cours de la cirrhose.

C’est une méthode de radiologie interventionnelle sans ouverture du ventre qui consiste à passer par une veine du coup (jugulaire) pour créer un chenal entre une branche de la veine porte et une veine hépatique. Le chenal de dérivation ainsi créé sera maintenu ouvert par l’insertion d’une prothèse métallique couverte ou « stent » à l’intérieur du foie. Cette intervention se réalise le plus souvent sous anesthésie générale et dure environ une heure.

  1. La ligature de varice oesophagienne : LVO

Ce procédé est utilisé pour prévenir, c’est à dire éviter, ou traiter une hémorragie par rupture de varices situées dans l’œsophage ou l’estomac.

L’HTP est responsable du développement de varices dans l’œsophage et l’estomac qui, sous la pression, peuvent se rompre et entrainer une hémorragie digestive.

Mortel dans près d’un cas sur deux il y a 40 ans, cet évènement aujourd’hui pris en charge précocement et en association avec un traitement peut être évité dans quasiment 90% des cas.

La LVO est le traitement endoscopique de référence des varices de l’œsophage. Il s’agit de réaliser une endoscopie par la bouche (tuyau muni d’une caméra) pour mettre en place un élastique sur une varice après l’avoir aspirée. Cet élastique va étrangler la varice qui finit par tomber au bout de quelques jours et cicatriser. On peut, au cours d’une même séance, poser plusieurs élastiques sur différentes varices.

On distingue la LVO d’hémostase (pour arrêter une hémorragie) de la LVO de prévention pratiquée chez un patient qui présente de grosses varices oesophagiennes  à risque de rupture. La LVO remplit alors un rôle préventif avec pour but de les faire disparaître avant qu’elles ne saignent.

  1. Ponction d’ascite : paracentèse

Ce procédé consiste à pénétrer dans le ventre à travers la peau à l’aide d’une aiguille dans laquelle est situé un cathéter (petit tuyau) pour évacuer l’ascite (eau dans le ventre).

La ponction se réalise en général en position allongée sous anesthésie locale au niveau du coté gauche entre la hanche et la dernière côte. On peut s’aider d’un appareil échographique pour repérer l’ascite. Une fois que l’aiguille a pénétré dans le ventre et que l’eau peut être aspirée, l’aiguille est retirée et le cathéter laissé en place jusqu’à évacuation maximale de l’eau.

On réalise ce geste pour analyser le liquide d’une part (recherche d’une infection) et pour évacuer l’eau, ce qui permet un soulagement immédiat et rapide en cas d’ascite tendue.

Si le volume d’eau évacué dépasse 5 litres, une perfusion d’albumine (4) est alors nécessaire.

(1) Bilirubine : pigment biliaire, produit principal de la dégradation des globules rouges, constituant de la bile, présent dans les selles et les urines sous forme conjuguée avec l’acide glucuronique. La forme non conjuguée est appelée bilirubine libre (ou indirecte). Après passage dans le foie, elle est glucuronoconjuguée puis éliminée par les voies biliaires, La forme conjuguée (ou directe) est la forme soluble de la bilirubine dans les liquides biologiques. Une augmentation de la bilirubine dans le plasma au-delà de 50 µmol/L s’accompagne de l’apparition d’un ictère.

(Vient du grec kholê = bile, stasis= s’arrêter) = défaut de la sécrétion ou de l’excrétion biliaire. Elle peut avoir pour conséquences un ictère, un prurit (grattage), et une élévation de du taux des phosphatases alcalines dans le sang. Selon l’origine de l’anomalie, on distingue la cholestase intra et extra-hépatique.

(2) Enzymes : Substance de nature protéinique, généralement macromoléculaire, douée d’une activité catalytique vis-à-vis de molécules, appelées substrats. La plupart des réactions biochimiques sont catalysées par des enzymes spécifiques.

(3) Cholestase : (Vient du grec kholê = bile, stasis= s’arrêter) = défaut de la sécrétion ou de l’excrétion biliaire. Elle peut avoir pour conséquences un ictère, un prurit (grattage), et une élévation de du taux des phosphatases alcalines dans le sang. Selon l’origine de l’anomalie, on distingue la cholestase intra et extra-hépatique.

(4) Albumine : (Vient du grec kholê = bile, stasis= s’arrêter) = défaut de la sécrétion ou de l’excrétion biliaire. Elle peut avoir pour conséquences un ictère, un prurit (grattage), et une élévation de du taux des phosphatases alcalines dans le sang. Selon l’origine de l’anomalie, on distingue la cholestase intra et extra-hépatique.