L’échinococcose alvéolaire (EA) est une maladie parasitaire rare due au développement dans le foie de la larve d’un petit ténia, Echinococcus multilocularis, (ver plat qui se développe dans l’intestin). C’est une maladie potentiellement grave car le mode de progression du parasite s’apparente à celui d’un cancer du foie à marche lente.
Cette parasitose qui ne sévit que dans l’hémisphère nord (les œufs du parasite craignent la chaleur et la sécheresse) touchait classiquement les ruraux de l’est de la France. Les zones d’endémie « historique » de l’EA en France sont la Lorraine, la Franche-Comté, Rhône-Alpes, et à un moindre degré celle du Massif Central.
Cependant, la situation s’est beaucoup modifiée au cours des trente dernières années. La limite occidentale de la zone d’endémie française dépasse désormais Paris et concerne également les zones urbaines. Le registre français des cas d’EA tenu au Centre National de Référence (CNR) échinococcoses du CHU de Besançon indique par ailleurs une augmentation du nombre de nouveaux cas diagnostiqués chaque année (cas incidents) : la moyenne habituelle était, jusqu’à la fin des années 1990, de 15 nouveaux cas par an. Actuellement, une quarantaine de nouveaux cas sont répertoriés chaque année.
Cette constatation est également faite pour les autres pays d’Europe concernés par cette maladie parasitaire (Suisse, Allemagne, Autriche) et on observe également l’émergence de cas dans des pays jusqu’alors peu ou non concernés par l’EA (Belgique, Pays-Bas, Pays Balte, Pologne, Slovaquie…). Au niveau mondial, la Chine constitue le plus important foyer d’EA humaine (provinces du centre et de l’ouest du pays).
Le cycle parasitaire nécessite un hôte définitif, le renard, qui héberge les vers adultes d’Echinococcus multilocularis (très petits ténias, de quelques millimètres de long) dans son intestin. La dissémination des œufs dans le milieu extérieur se fait par les crottes du renard. L’hôte intermédiaire habituel, hébergeant la larve du parasite dans son foie, est un rongeur (surtout le campagnol). Le cycle se referme lorsque ces campagnols infectés sont dévorés par des renards. La larve peut alors, dans l’intestin de ces derniers, poursuivre sa maturation et devenir un ver adulte capable de produire des œufs.
Les renards jouent sûrement un rôle prépondérant : il est constaté depuis une quinzaine d’années une augmentation très importante de leur présence dans certaines régions, associée à une augmentation de la prévalence du portage du parasite, dans les zones d’endémie mais aussi dans des zones non classiquement concernées par la maladie humaine. De plus, on dispose de données démontrant la présence de renards infectés par Echinococcus multilocularis dans les grands centres urbains, exposant les populations des villes, jusqu’alors peu concernées par ce risque parasitaire.
Néanmoins, A côté de ce cycle « sauvage », on décrit un cycle parasitaire « domestique », faisant intervenir le chien ou le chat comme hôte définitif. Le chat semble cependant un « mauvais » hôte définitif d’E.multilocularis car les vers atteignent difficilement leur maturité dans son intestin.
La contamination humaine peut avoir lieu par contact direct avec un hôte définitif infesté (le pelage de ces animaux peut héberger des œufs du parasite). Cependant la contamination est le plus souvent indirecte, par ingestion d’aliments crus, souillés par les crottes des hôtes définitifs infestés (végétaux et baies sauvages ramassés au ras du sol, ou poussant dans des jardins accessibles aux renards ou aux chiens). La contamination humaine pourrait aussi intervenir au cours du travail agricole, lors d’une manipulation de terre humide. Les oeufs d’E.multilocularis peuvent rester infestant près d’une année dans un milieu extérieur humide et froid. Ils sont par contre sensibles à la chaleur et à la sècheresse. L’Homme est un hôte intermédiaire accidentel, impasse parasitaire pour le cycle.
Actuellement le diagnostic d’EA est régulièrement porté plus précocement que par le passé (sensibilisation des praticiens exerçant en zone d’endémie, information des populations exposées, généralisation de l’échographie…). Les diagnostics fortuits sont beaucoup plus fréquents qu’il y a 30 ans : découverte de la maladie à l’occasion d’un bilan de santé sanguin indiquant une discrète anomalie des enzymes hépatiques, repérage d’un foyer parasitaire lors d’une échographie abdominale motivée pour un autre problème de santé…De ce fait, la moitié des patients est aujourd’hui asymptomatique au diagnostic. Il y a 30 ans, cette situation ne concernait que 20% des patients. En effet, la maladie était habituellement révélée par des symptômes cliniques. Dans la moitié des cas, il s’agissait d’un ictère (jaunisse) traduisant habituellement une maladie déjà très avancée avec une gêne à l’écoulement de la bile. Aujourd’hui, un ictère n’est révélateur de la parasitose que dans 5% des cas en Europe. Ce n’est pas le cas en Chine, où la situation diagnostique ressemble plutôt à ce qui était observé en France dans les années 1980.
Dans 75 % des cas, la zone parasitée du foie a un aspect très caractéristique, qui fait d’emblée évoquer le diagnostic.
La sérologie (analyse de sang) d’échinococcose alvéolaire va être demandée en deuxième ligne et confirmera habituellement le diagnostic.
Dans les cas restants, des examens morphologiques (sur les corps et les organes visibles) complémentaires permettent généralement d’aboutir au diagnostic.
Il est très rare d’avoir recours à une biopsie (1) guidée par une échographie de la lésion pour faire le diagnostic d’EA.
La sérologie parasitaire à visée de dépistage n’est pas recommandée : certaines personnes vivant en zone d’endémie pour cette parasitose peuvent avoir des anticorps dirigés contre le parasite et une sérologie positive sans pour autant développer la maladie hépatique : ce sont des sujets « contacts » qui ont rencontré le parasite mais qui ont correctement réagi avec leurs défenses immunitaires. On parle de « cicatrice sérologique ». La plupart des humains sont d’ailleurs naturellement résistants vis-à-vis de l’infestation par le parasite de l’échinococcose alvéolaire, ce qui explique la rareté de cette affection. Néanmoins, on assiste depuis une vingtaine d’années, avec le développement des traitements immunosuppresseurs pour diverses maladies chroniques inflammatoires, des chimiothérapies pour les affections cancéreuses, à une émergence de l’échinococcose alvéolaire dans ces situations d’immunosuppression. Il s’agit alors d’une échinococcose alvéolaire « opportuniste ».
Il n’y a malheureusement pas à l’heure actuelle de médicament à même de détruire les larves du parasite dans le foie. Le seul traitement pouvant permettre la guérison est une intervention chirurgicale emportant toute la masse parasitaire. Cela n’est possible que lorsque la maladie n’est pas trop évoluée et qu’en particulier les grosses voies biliaires, les gros vaisseaux ne sont pas envahis. Cette solution thérapeutique n’était possible que dans un très faible pourcentage de cas il y a 30 ans (moins de 5%) du fait de diagnostics trop tardifs. Actuellement, grâce au diagnostic plus précoce et aux progrès de la chirurgie, 30 à 40 % des patients peuvent bénéficier de gestes chirurgicaux curatifs.
Pour les patients non accessibles à une chirurgie d’exérèse, de nombreux progrès sont également intervenus au cours de ces trente dernières années, contribuant à une nette amélioration du pronostic. Un traitement par Albendazole au long cours, médicament parasitostatique à même « d’endormir » le parasite, permet dans la large majorité des cas de stabiliser la lésion parasitaire. En cas de survenue d’une complication évolutive telle qu’une obstruction biliaire, un abcès (2) au centre du tissu parasitaire, pouvant générer des infections sévères, les gestes de chirurgie palliative ont désormais laissé la place aux techniques instrumentales, endoscopie biliaire interventionnelle avec pose de prothèses permettant d’améliorer l’écoulement de la bile, radiologie interventionnelle (3) avec drainage de voies biliaires dilatées. Le suivi régulier des patients atteints de formes inextirpables d’EA est essentiel. Chaque patient reçoit des conseils adaptés à sa propre situation car la complexité de la maladie impose une personnalisation de la prise en charge. Très exceptionnellement, en situation d’impasse thérapeutique, une transplantation hépatique peut être proposée.
Le diagnostic de la maladie se fait par le dosage de la concentration en AAT qui est abaissé au cours de la maladie. Il est possible d’avoir une caractérisation de la protéine (phénotypage par électrophorèse). La majorité des patients qui développent une maladie hépatique ou pulmonaire sont homozygotes (gène ZZ). La biopsie (1) hépatique, quand elle est réalisée, permet de mettre en évidence avec une coloration spécifique, des inclusions caractéristiques évocatrices du diagnostic. Il est maintenant possible de rechercher par les techniques de biologie moléculaire les anomalies connues mais également d’autres anomalies plus rares sur le gène spécifique.
Les patients ont consulté entre 3 et 7 médecins avant que le diagnostic ne soit posé et le délai entre les premiers symptômes et le diagnostic est en moyenne de 7,5 ans.
Le déficit en alpha-1-antitrypsine est un défaut génétique incurable à ce jour. On cherche donc à soulager les troubles et à ralentir autant que possible l’évolution de la maladie. Il est donc nécessaire d’avoir une bonne hygiène de vie et d’obtenir un arrêt immédiat du tabagisme chez les fumeurs. Les personnes atteintes doivent éviter le tabagisme passif et l’inhalation de substances irritantes. Les vaccinations contre la grippe et le pneumocoque sont recommandées pour une protection contre ces infections qui peuvent se compliquer.
En cas d’atteinte pulmonaire sévère, une oxygénothérapie (insufflation d’oxygène par voie artificielle) peut être nécessaire et dans certains cas une transplantation pulmonaire indiquée. Une autre possibilité de traitement appelée thérapie de substitution est en cours d’évaluation. Elle consiste à administrer, à intervalles réguliers, une perfusion d’AAT.
En cas d’atteinte hépatique, une surveillance par un spécialiste est recommandée, une transplantation hépatique en cas d’insuffisance hépatique sévère ou de cancer du foie est parfois nécessaire.
La cirrhose est la deuxième cause de décès au cours du déficit en AAT (10 % des causes de décès), loin derrière l’emphysème pulmonaire, l’augmentation du volume des alvéoles pulmonaires qui conduit au déchirement des parois élastiques (72 % des causes de décès).
(1) Biopsie : prélèvement d’un échantillon de tissu, d’organe (: ex biopsie hépatique pour le foie) ou d’une lésion pour une analyse, en général de son état microscopique, par un médecin spécialisé en anatomopathologie. Par extension, la biopsie désigne également le fragment de tissu obtenu.
(2) Abcès : amas de pus collecté dans une cavité résultant de la destruction (nécrose) d’un tissu solide. Abcès du foie suppuration circonscrite unique ou multiple développée dans le foie.
(3) Radiologie interventionnelle : acte thérapeutique réalisé sous le contre d’un moyen d’imagerie : par exemple pour le foie : destruction de tumeur pas radiofréquence, chimio-embolisation ou création de shunt portosystémique (TIPS).
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