Cher(e)s collègues, cher(e)s ami(e)s,
Nous sommes heureux de vous informer que, le 18 novembre dernier, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a autorisé l’utilisation du carvédilol (Kredex* et ses génériques) pour la prévention des complications de l’hypertension portale chez les malades atteints de cirrhose, sous la forme d’un cadre de prescription compassionnelle (CPC).
En effet, la seule indication reconnue du carvédilol portait jusqu’alors sur le « traitement de l’insuffisance cardiaque chronique stable, légère, modérée et sévère (fraction d’éjection ≤ 35%), en association avec le traitement conventionnel». Les conditions de prescription et de délivrance du carvédilol stipulaient que la primo-prescription était réservée aux spécialistes en cardiologie et aux spécialistes en médecine interne.
La mobilisation sans relâche du précédent bureau de l’AFEF et du Club Francophone pour l’Étude de l’Hypertension Portale a permis d’obtenir ce CPC qui étend la prescription du Carvédilol aux malades atteints de cirrhose, dans les indications suivantes :
- Prévention de la décompensation de cirrhose chez les malades ayant une hépatopathie chronique avancée compensée et une hypertension portale sévère
- Prévention secondaire de la rupture de varices œsophagiennes ou gastriques, en association avec un traitement endoscopique.
L’ANSM a en effet reconnu que dans cette population non couverte par l’AMM, il existe un besoin thérapeutique non couvert, avec une efficacité et une sécurité présumées par les données disponibles, notamment l’essai randomisé contrôlé espagnol PREDESCI (Villanueva et. al Lancet 2019). De plus, pour ces indications, le CPC permet la primo-prescription de carvédilol par des spécialistes en hépato-gastroentérologie.
Cependant, il est important de noter que même si les modalités ne sont pas précisées, il est mentionné qu’«une surveillance particulière est nécessaire pendant le traitement ». Chez les malades présentant une insuffisance cardiaque, l’instauration du traitement se fait en milieu hospitalier avec une augmentation progressive de la posologie. Une surveillance de la pression artérielle, de la fréquence cardiaque sont recommandés à l’instauration et pendant toute la durée du traitement.
Chez les malades atteints de cirrhose, il est recommandé de débuter le traitement à faible dose (6.25 mg par jour répartis en 1 ou deux prises) et d’augmenter progressivement jusqu’à l’obtention de la réponse hémodynamique ou la dose habituelle de 12.5 mg par jour (pouvant parfois être augmentée jusqu’à 25 mg par jour). A la différence des malades traités par propranolol, chez qui l’objectif est d’atteindre une fréquence cardiaque au repos d’environ 55 à 60 battements par minute ou une réduction de 25 % par rapport à la valeur initiale, il n’y a pas d’objectif de fréquence cardiaque pour les malades traités par carvédilol. L’évaluation de la tolérance repose sur la pression artérielle, avec comme objectif de maintenir une pression artérielle systolique ≥ 90 mm Hg et une pression artérielle moyenne ≥ 65 mm Hg. Enfin, rappelons que même si les données de la littérature ont rapporté une bonne tolérance du carvédilol chez les malades atteints de cirrhose, il est recommandé d’éviter son emploi chez les patients présentant une ascite réfractaire, une hypotension artérielle ou une insuffisance rénale aiguë.
Le CPC du carvédilol est valable pour une durée de 3 ans, et pourra, si d’autres essais cliniques confirment son efficacité et sa sécurité, conduire à une extension de l’AMM.
Nous sommes très heureux de partager avec vous cette nouvelle qui nous permet de proposer à nos malades une prise en charge conforme aux dernières recommandations.
Bien cordialement, bien amicalement,
Laure Elkrief, Trésorière de l’AFEF et membre du Club Francophone pour l’Étude de l’Hypertension Portale
Alexandre Louvet, Secrétaire Général de l’AFEF
Georges-Philippe Pageaux, Président de l’AFEF